lundi 25 mai 2015

Ethiopie: Gondar et monts Simien

Après un vol sans histoire, j’arrive à Gondar. Je n’ai évidemment rien réservé, on verra bien comment ça se présente. A l’aéroport, je fais la connaissance de deux photographes italiens avec qui je partage un taxi. Ils ont une adresse d’hôtel, ça tombe, je n’en ai pas. Chambre pour le soir, ça c’est fait. Je peux maintenant faire le tour des agences de trekking pour organiser mon tour dans le parc national des monts Simien. La 1e que je trouve me satisfait, 5 jours, 4 nuits et pas d’autres touristes dans le groupe (j’ai spécifiquement demandé un guide en bonne forme physique pour pouvoir aller vite). Groupe tout de même assez conséquent: 1 guide, 1 scout, 1 cuisinier, 1 assistant cuisinier et 2 muletiers. Tout ce personnel pour moi, je ne suis pas fan mais impossible de faire autrement, ce sera rando en mode grand confort. Maintenant que les formalités sont réglées, je peux partir visiter l’attraction de Gondar, son château fort médiéval absolument magnifique.





Le soir, je m’accorde un bon gros hamburger. Mauvaise idée, je suis malade toute la nuit, problème digestif et problème de souffle. Je marche 5 mètres pour aller à la salle de bains et je suis essoufflé. Ca s’annonce bien pour demain, altitude de départ 3600m et j’ai bien dit que je voulais marcher vite. Je dors à peine 2 heures.
Le lendemain, je me sens un peu mieux mais ce n’est pas non plus la grande forme. Après 3h de trajet, on commence à marcher, la vue est splendide, la forme un peu moins.


En chemin, on croise une des très nombreuses colonies de babouins qui peuplent le parc.


On arrive au campement en milieu d’après-midi. Les tentes sont montés et le goûter est prêt: grand luxe. Même si j’ai du mal à avancer, le guide m’affirme qu’on est allé vite. En début de soirée, on part à un point de vue à une vingtaine de minutes du campement pour admirer le coucher du soleil. Moment absolument magique.


Le soir, je prends un repas normal. Mauvaise idée, je suis malade toute la nuit. Assez ironiquement, alors que je travaille pour MSF, je suis parti sans aucun médicament. Le matin, je ne peux même pas avaler un verre d’eau sans passer par la case toilettes dans les 5 minutes. Voyant ça, le guide me propose de rester ici pour la journée afin que je récupère. Quelle drôle d’idée !!! Je suis venu pour marcher, tant que je peux avancer, on avancera. C’est parti, l’estomac léger, sous un beau soleil. Les vues sont splendides.



La montée à 4000 mètres sans acclimatation et l’estomac vide est un peu difficile mais je m’accroche. 



On finit par arriver au bivouac situé à 3600 mètres d’altitude. Je bois une tasse de thé vers 5h et mon estomac a l'air de coopérer cette fois-ci. Il semblerait que mes problèmes soient de l’histoire ancienne et le soir, j’arrive à m’alimenter normalement. 
Petit point de vue sympa.


Voyant que ça va mieux, je propose au guide de changer le programme et de monter au point culminant d’Ethiopie, le Ras Dashen. Ce changement implique beaucoup plus de dénivelé, ça tombe bien, je suis venu pour ça.
Le lendemain, on s’échauffe avec une petite montée à 4300 mètres, suivi d’une longue descente jusqu’à la rivière 1500 mètres plus bas. On en profite pour voir des bouquetins Walia, espèce endémique et en danger d’extinction.



La descente se fait en marche rapide, dommage, j’aurais bien couru un peu. On pique-nique à la rivière avant de remonter vers le bivouac situé à 3200 mètres d’altitude. Comme on est allé assez vite (un peu trop pour le guide qui a les genoux en compote), les muletiers ne sont pas encore arrivés. Pour passer le temps, je pars faire un footing, direction le Ras Deshen. Je n’ai aucune idée du chemin à suivre mais j’ai juste envie de me dégourdir les jambes. Après 1h15 de montée, je décide de faire demi-tour et retourne au campement. Pas de doute, j’ai retrouvé des forces. Au programme du lendemain, l’ascension du Ras Deshen, 1300 mètres plus haut. En temps normal, le guide compte 10 à 11h aller et retour. Comme on avance bien, il estime à 7/8 h donc pas besoin de se lever aux aurores. 
Le lendemain, départ vers 7h avec un temps superbe. La montée se fait sur un rythme tranquille (avec beaucoup trop de pauses à mon goût). J’ai bien fait de faire demi-tour la veille, je n’aurais jamais trouvé le chemin tout seul. Voilà, ça y est, on a atteint le point culminant d’Ethiopie (4543 mètres). Assez paradoxalement, la vue n'est pas très dégagée, beaucoup de pics aux alentours à peine moins hauts.



On fait la descente à un bon rythme, en prenant pas mal de raccourcis dans la pente.  Après un peu plus de 5h, nous sommes de retour au bivouac. Le problème quand on va vite, c’est que la journée se termine trop tôt. Du coup, je me lance un petit challenge chronométrique : remonter au Ras Deshen en 2h15 et redescendre en 1h15. Je pars sur un bon rythme et ma vitesse ascensionnelle (600 mètres/heure) est conforme au plan. Malheureusement, sur la fin, je me trompe de chemin et perds de précieuses minutes. Je fais un croix sur mon objectif de 2h15 mais au plus je me rapproche du sommet, au plus je me rends compte que c’est encore jouable. Je mets un dernier coup de turbo en faisant quand même attention sur la fin car c’est de l’escalade (facile). J’arrive au sommet en 2’14:32. Objectif atteint. Comme j’ai bien poussé sur la fin, je m’accorde 4 minutes de pause avant de rentrer. Gros gros plaisir à la descente, avec une alternance de passages techniques et de passages roulants. Encore une fois, je suis limite niveau chrono mais j’atteins le bivouac en 1’14:42. 2e objectif atteint. 3h34 aller-retour tout compris, ça va, ma forme n’a pas complètement fondu sous le soleil de Juba. Une bien belle journée : 42 km et 2800 mètres de D+. 
Le lendemain, il faut rentrer au bivouac d’il y a 2 jours, redescente à la rivière puis remontée à 4300 et redescente à 3600. Je paye mes efforts de la veille et suis beaucoup moins facile. Peu importe, je me suis bien fait plaisir les 2 jours précédents. 
Le Ras Deshen se trouve dans le fond quelque part.


Vesr 14h, on rejoint le minivan qui va nous ramener, il n’y a plus qu’à attendre les muletiers qui sont derrière. Retour sans histoire à Gondar où je retourne dans le même hôtel et mange le même hamburger (sans conséquence cette fois-ci). Le lendemain, je redécolle pour Addis où je retrouve Paul, que j’avais rencontré à Lalibela. Ses parents y habitent et il avait très généreusement proposé de m’héberger. Ça tombait plutôt pas mal, vu que je n’avais rien réservé. Le soir, on part faire le tour de la ville à la recherche de cartes postales. On finira par en trouver au Hilton, un seul modèle disponible, je l’achète 18 fois. On part ensuite manger koréen, histoire de changer un peu. Le lendemain matin, Paul et sa mère m’accompagnent en voiture à l’aéroport.
Au final, 9 jours absolument magiques en Ethiopie, à courir dans la montagne, profiter de paysages splendides, un très bon break avant de retrouver Juba pour les 3 derniers mois de ma mission.


lundi 11 mai 2015

Ethiopie: Lalibela

Je sais, vous allez encore dire que je fais les choses dans le désordre, je commence par les vacances avant de parler du boulot. Promis, j’écrirai sur mon séjour au Sud Soudan (Soudan du Sud, désolé Papa) mais pour l’instant, j’ai envie de vous parler de mes vacances après 3 mois à (Jubi) Juba (Djouba, désolé Papa). N’ayant que 9 jours, je décide de ne pas partir trop loin et sur les conseils d’autres expats, je choisis l’Ethiopie, destination touristique assez peu connue et pourtant … Au programme, 2 étapes, Lalibela et Gondar/Simien mountains. Au menu aujourd’hui, la 1e étape, Lalibela.
Départ de Juba vendredi en fin d’après-midi, 2 heures de vol pour arriver à Addis Abeba, capitale de l’Ethiopie. D’un naturel très organisé, je n’ai pas acheté mon billet pour Lalibela le lendemain, je me dis que je l’achèterai en arrivant. Problème : à 7 heures du soir, c’est un peu tard. Comme l’avion part le lendemain à 8h, pas moyen de l’acheter juste avant non plus. Pour l’instant, ma préoccupation est de récupérer mon sac mais il reste introuvable. Un éthiopien est dans le même cas que moi et on commence à discuter. J’en profite pour lui expliquer mon problème de billetterie et coup de bol, il m’informe que l’hotel Hilton a une agence de voyage ouverte jusqu’à 8h. Entretemps, mon sac arrive, c’est parti direction le Hilton. Bizarre sensation que de prendre un taxi après 3 mois où les seules voitures dans lesquelles je monte sont celles de MSF. J’achète mes billets. Problème suivant : où dors-je ce soir ? Le Hilton, c’est sympa mais ce n’est pas tellement dans mon budget. Ils ont quand même l’obligeance de m’indiquer un hôtel plus abordable dans le coin. C’est bon, j’ai un endroit où dormir.
Réveil le lendemain à 5h30 pour prendre l’avion, vive les vacances (ma meilleure grasse mat’ aura duré jusqu’à 7h30). Après un vol sans histoire, j’arrive à Lalibela. Je m’informe du prix du taxi. Après un rapide calcul, en me basant sur le prix que j’ai payé à Addis, j’en déduis que ça ne doit pas être très loin et je décide de partir à pied. Et j’ai une autre excellente raison de partir à pied, je marche parce que  … je peux. A Juba, les règles de sécurité font que le seul endroit où je marche, c’est pour aller du bureau à la maison, soit environ 400 mètres. Je n’avais pas conscience à quel point ça me manquait mais là, au milieu des montagnes, je retrouve le plaisir simple de marcher. Quelques taxis me dépassent et ont l’air surpris de me voir marcher. L’un d’eux s’arrête et j’en profite pour lui demander à quelle distance se trouve Lalibela. Ce à quoi il me répond « 2-3 kilomètres ». Il me prend pour un fou quand je lui dis que je vais marcher. Peu importe, je continue. 4 enfants se joignent à moi. Ils m’affirment que c’est super loin, 19 km par la route mais juste 7 si je coupe par les montagnes. Je ne les écoute pas et continue sur la route. Après 45 minutes de marche, toujours pas de Lalibela en vue, il y a quelque chose qui cloche. Un bus passe et je décide de monter. Après une demi-heure, j’arrive enfin à Lalibela qui n’est pas à 2-3 kilomètres de l’aéroport mais 23. Je le saurai pour la prochaine fois.
Il est bientôt midi, je pars au restaurant Ben Abeba, à l’architecture insolite, qui offre une vue à couper le souffle et un injira (plat traditionnel éthiopien) à se taper le postérieur sur la croûte continentale.



Après avoir trouvé une chambre, je m’équipe pour aller une des activités favorites, aller courir dans la montagne. Quel plaisir de retrouver au milieu de la nature, le souffle court, perdu dans la forêt. Je grimpe jusqu’à arriver tout en haut, la vue est magnifique. 


Enorme kiff à la descente sur un petit monotrace pas trop technique où il y a moyen de dérouler et se faire plaisir. 



Le soir, je retourne à Ben Abeba pour diner et j’y rencontre Paul et Banoo, 2 étudiants allemands avec qui je sympathise. Nous passons la soirée ensemble et ils m’emmènent dans un bar pour boire du vin de miel et écouter de la musique traditionnelle. 


Le lendemain, place à l’attraction de Lalibela : les églises. Mais tout d’abord, un peu d’histoire. Lalibela tire son nom du roi Gebre Mesqel Lalibela, qui comme chacun le sait probablemen déjà, était membre de la dynastie Zagwe, qui a régné sur l’Ethiopie au 12e siècle. Cela dit, Gebre n’était pas destiné à être roi, ça aurait dû être son frère ainé (qu’on appellera Maurice). La légende raconte qu’à un moment durant son enfance, Gebre se soit retrouvé entouré par un essaim d’abeilles (bienveillant l’essaim). Sa mère y a vu un signe royal et décidé que Gebre devrait être roi. Forcément, Maurice l’a mauvaise et décide de préparer une omelette au cyanure pour son petit frère. Innocemment, il arrive un samedi matin pendant les minikeums et propose à son frère son omelette. Gebre lui, ne jure que par les chocapic au petit dej. Devant l’insistance de son frère, il accepte de manger l’omelette, qu’il trouve d’ailleurs succulente (la fameuse omelette à l’ingrédient secret) et tombe dans un profond sommeil pendant 3 jours (et plus ou moins autant de nuits). Au bout de 3 jours, il se réveille comme une fleur et devant ce miracle, Maurice ne peut que s’incliner et laisse le trône à son frère. A cette époque, les éthiopiens, très croyants, ont pour habitude de se rendre en pèlerinage à Jérusalem, ce qui n’est pas sans danger (les statistiques officielles rapportent que 47% d’entre eux finissent dévorés par les loups). Lalibela a donc l’idée géniale d’amener Jérusalem à Roha (l’ancien de la ville) et décide de faire construire des églises. En grand visionnaire qu’il est, il décide de sortir un peu de l’ordinaire et plutôt que de les construire sur les rochers, il se dit que « dans » les rochers, ça ferait plus classe. En à peine 20 ans, 11 églises sont construites. La légende raconte que les anges auraient donné des coups de pioches pendant la nuit pour aider. Et le résultat est absolument incroyable.





Une fois la visite terminée, je m’accroche un petit jus de fruits frais (un t-shirt MSF dédicacé à celui ou celle qui trouve tous les parfums). 

En fin d’après-midi, je remonte en courant à un point de vue pour admirer le coucher de soleil sur Lalibela. Je fais la montée en compagnie de deux jeunes éthiopiens, j’arrive à en lâcher un mais l’autre reste bien accroché à moi jusqu’en haut.


A la descente, impossible de résister, je me mets à courir. Les deux jeunes se mettent à courir eux aussi et c’est parti pour une course folle sur les petits chemins. J’étais parti sur un rythme soutenu mais là, c’est du sprint, on coupe dans la pente, on se double, on se redouble. L’un des deux a vraiment une belle pointe de vitesse, à chaque fois que je me rapproche et que je pense pouvoir le dépasser, il en remet une couche. Je ne sais pas par quelle miracle je parviens à ne pas laisser trois chevilles sur le chemin mais j’arrive à Lalibela en seul morceau, 2e mais qu’est-ce que c’était bon. Je retrouve Paul et Banoo pour un diner aux chandelles (pour cause de coupure de courant généralisée).

Le lendemain, départ pour Gondar. Etant dument informé, je décide cette fois-ci d’aller à l’aéroport à pied (c’est l’avantage de voyager léger), un petit 9 km à travers les collines. Je ne connais pas le chemin mais je connais la direction générale, c’est sud-sud/ouest. Je me prends 1h de marge, ce n’est pas mon genre de me perdre mais sait-on jamais … La première partie est très plaisante sur un petit chemin en pente douce. Après quelques kilomètres, j’arrive sur une piste carrossable beaucoup moins sympa. Je croise une voiture et j’en profite pour m’informer : oui, je suis sur la bonne route, plus que quelques kilomètres. Comme je suis en avance, je décide de quitter cette piste pour faire un peu de hors-piste, ce sera quand même plus fun. Au cap, je décide de couper tout droit dans les collines, pas de chemin, les montées et les descentes droit dans la pente s’accumulent, je ne croise personne. Le temps passe et toujours pas d’aéroport en vue. A chaque fois que j’arrive en haut d’une colline, je pense déboucher sur la bonne vallée … ou pas. Le chrono continue à avancer et toujours rien. Je sais que la direction générale est bonne donc j’accélère et continue dans la même direction. Je finis par déboucher sur l’arête d’où je vois enfin l’aéroport. 


Il y a encore un bout de chemin mais ce n’est plus que de la descente. Je repars en courant car je n’ai plus beaucoup de marge. J’arrive finalement à l’aéroport après 15 km et presque une heure d’avance sur le vol. On peut voir sur la trace GPS que je ne me suis pas trop mal débrouillé pour la direction. J’apprends au check-in que c’est trop tard, le check-in est fermé, j’aurais dû arriver avec 2h d’avance. Avec deux vols par jour, je trouve ça quand même un peu abusé. Après une courte discussion, j’arrive à obtenir mon billet, direction Gondar.

Pour résumer, ces églises absolument incroyables et le plaisir de recourir en montagne ont fait de cette étape un séjour absolument inoubliable, sans oublier bien sûr la nourriture absolument délicieuse et cette belle rencontre avec Paul et Banoo. Un autre point positif et surprenant est le très faible nombre de touristes vus pendant ces 3 jours. L’Ethiopie est définitivement une destination touristique qui gagne à être connue.